Les mathématiques, une science d’avance
Finies les mathématiques ? Que non !
Nées avec l’humanité[1], développées dès l’antiquité, elles sont toujours vivantes et imprègnent tous les aspects de notre vie.
Qu’y a t-il de commun entre les voitures, trains ou avions que nous empruntons, nos téléphones, la radio ou la télévision, nos ordinateurs, les systèmes de communication, notre système bancaire, nos cartes de crédit, le GPS, la prévision météorologique et certains aspects de la recherche en biologie moléculaire ? Les mathématiques !
Passés les premiers problèmes de comptabilité ou d’astronomie, le développement des mathématiques a été pendant de longs siècles indissociable de celui de la physique, lui fournissant un langage efficace et des outils incomparables.
Pour Galilée, « la nature est écrite en langage mathématique » [2], et en 1960 le physicien Eugène Wigner s’émerveille de la « déraisonnable efficacité des mathématiques dans les sciences de la nature » [3]
La création mathématique a souvent permis une compréhension accrue ou une description plus efficace des phénomènes physiques.
En retour, les théories physiques ont fourni aux mathématiciens et mathématiciennes de nouveaux problèmes, des intuitions ou des motivations. Et le cycle est relancé… Analyse, calcul différentiel et intégral, théorie des équations différentielles ont été les premiers acteurs de ce jeu.
De nos jours, l’étude des équations aux dérivées partielles, les systèmes dynamiques sont toujours des domaines très actifs des mathématiques où s’entrecroisent questions issues des autres disciplines et création de nouveaux concepts.
Sans oublier la géométrie différentielle, point de rencontre entre la relativité générale, la théorie des champs, et la toute récente théorie des cordes qui pourrait être un des plus grands bouleversements de la physique contemporaine.
Même des domaines réputés purement abstraits comme la géométrie algébrique, l’algèbre et la topologie interviennent aujourd’hui de manière aussi cruciale qu’inattendue dans les travaux de physiciens théoriciens et physiciennes théoriciennes qui visent à unifier les lois de la physique.
La naissance de l’informatique aura été une des grandes révolutions du siècle qui vient de s’achever. Grâce à elle, des algorithmes efficaces de calcul scientifique et numérique ont pu être implémentés sur des ordinateurs.
Améliorés sans cesse depuis 40 ans, ils sont maintenant des outils indispensables pour tout ingénieur.
Conjugués aux progrès de l’électronique, ils permettent d’assurer la sécurité des transports aériens, de réguler le trafic des trains, de modéliser les comportements de systèmes complexes sans recourir à l’expérience en grandeur réelle dans les cas où celle-ci serait trop coûteuse, dangereuse, voire impossible (en météorologie par exemple). Les procédés d’imagerie interviennent en médecine… comme en archéologie !
Mais informatique et mathématiques ont partie liée bien au-delà des simples performances de calcul. Les ordinateurs sont les enfants de l’électronique, de la microélectronique, des transistors et des cristaux liquides, mais aussi des mathématiques.
Trente ans avant la construction des premières machines, des mathématiciens formalistes comme John von Neumann ou Alan Turing en avaient décrit les principes et pensé leur organisation. Juste retour des choses, l’informatique pose aujourd’hui de nouveaux défis aux mathématiciens et mathématiciennes : l’algèbre, la logique mathématique, la théorie des graphes, les mathématiques discrètes sont au cœur de ce fourmillement d’idées.
L’étude des nombres est une des plus anciennes activités humaines. Simple amusement de savants et savantes pas tout à fait sortis de l’enfance ?
Jugez-en plutôt : sans elle, pas de codes secrets ni de procédures de cryptage des informations contenues dans vos cartes bancaires, ni algorithmes de correction automatique d’erreurs dans les transmissions de données. Ici, ce sont la théorie des nombres, l’arithmétique et la géométrie algébrique qui tiennent la première place, et les techniques implantées dans les puces ou les ordinateurs font appel aux résultats théoriques les plus récents.
Mais qui dit banque dit recherche des meilleurs placements, modélisation de systèmes complexes, gestion des risques… Chacun de ces domaines a apporté de nouvelles questions pour les mathématiciens et mathématiciennes spécialistes de théorie des jeux, de mathématiques financières ou de probabilités.
Les statistiques sont peut-être l’un des aspects les plus multiformes des mathématiques. On les rencontre bien sûr dans la vie de tous les jours, dans des enquêtes aux objectifs variés, mais aussi dans les domaines à la pointe de la science ou de l’ingénierie.
Aujourd’hui de nombreuses situations fournissent un tel nombre de données que seules des méthodes statistiques efficaces permettent d’interpréter leurs résultats. Un seul exemple : en biologie moléculaire, la technique des puces à ADN permet d’étudier l’effet d’une pathologie sur une grande partie du génome. Au vu du nombre d’informations à brasser, l’interprétation serait hors de portée sans un traitement statistique fiable (le plus souvent sur ordinateur).
Et que celles et ceux qui ont l’amour de la science pour elle-même se rassurent : les interactions avec les autres disciplines ne sont pas le seul moteur des mathématiques. Le développement des connaissances à l’intérieur des mathématiques, l’apparition de nouvelles théories, la mise en relation de domaines considérés auparavant comme disjoints, créent chaque jour les conditions favorables à l’épanouissement des mathématiques et font toujours d’elles, comme autrefois, une science d’avance…
Une formation mathématique de haut niveau est un atout solide pour de nombreux métiers au sein de grandes entreprises industrielles.
Les ingénieurs mathématiciens et ingénieures mathématiciennes, spécialistes de modélisation et simulation numérique, ou les statisticiens et statisticiennes sont bien sûr les plus prisés. Mais ils ne sont plus les seuls : le développement rapide des technologies de l’information ont rendu nécessaire dans bien des milieux la présence d’experts en cryptologie ou en sécurité des systèmes de communication, compétences qui nécessitent une large part de mathématiques.
Certains métiers de la banque ou des assurances (en particulier le métier d’actuaire) exigent également une bonne connaissance des mathématiques.
De manière générale, avoir suivi avec succès des études exigeantes est une preuve de sérieux, de ténacité, et d’aptitude à maîtriser des concepts abstraits et complexes. Et les statistiques effectuées chaque année par l’APEC (Association Pour l’Emploi des Cadres) montrent que les étudiants et étudiantes en mathématiques ou en informatique sont toujours, année après année, les mieux armés pour entrer sur le marché du travail.
L’enseignement est aussi un débouché important pour les étudiants et étudiantes de mathématiques. L’importance de la discipline dans la scolarité secondaire, ou dans les classes préparatoires, a pour conséquence le recrutement de nombreux professeurs et professeures de collèges et de lycées chaque année.
Sans oublier les professeurs et professeures des écoles: on juge actuellement trop faible le nombre de celles et ceux qui sont passés par des études scientifiques. Dans nombre d’autres concours de la fonction publique, une aisance en mathématiques est un atout sérieux.
Enfin, les métiers de la recherche mathématique, que ce soit en milieu industriel ou dans le cadre académique, bien que numériquement peu importants, ont de quoi permettre d’assouvir la soif de savoir des plus passionnés.
Alors, n’hésitez plus : choisissez les mathématiques !
Notes
[1] Le plus ancien témoignage de calcul numérique a été découvert au Swaziland, en Afrique australe, sur des os gravés vieux de 35 000 ans
[2] Entretien sur les principaux systèmes du monde, 1633
[3]The Unreasonable Effectiveness of Mathematics in the Natural Sciences in Communications in Pure and Applied Mathematics, vol. 13, No. I (February 1960).